Les vertus des fraises et des fraisiers

Introduction

Ah! Le temps des fraises! Depuis plusieurs années maintenant, ce temps s’étire tout l’été, car on a développé des variétés qui produisent jusqu'à l'automne. On peut donc profiter de ces délicieux fruits pendant plus longtemps. Alors que l'on est à une époque de mondialisation, on valorise souvent des fruits exotiques venus d'ailleurs et réputés pour leurs vertus, mais notre terroir offre aussi sa part de trésors et la fraise en fait partie.
 
La fraise est à la fois originaire d'Europe, d'Asie et d'Amérique. Ceci est peu courant en botanique. Cela indiquerait-il que tous les peuples de l'hémisphère nord en ont besoin ? Son abondance et sa disponibilité en saison nous parlent-elles des avantages et des bienfaits de sa consommation ?

Mon histoire d'amour avec les fraises

J'adore les fraises, et ce, depuis que je suis toute jeune. Je ne sais pas si c'est parce que je suis née dans la saison des fraises que j'ai un penchant pour elles, mais je déguste avec un réel plaisir une fraise fraîchement cueillie, encore toute gorgée de soleil. Mmm ! Toutes jeunes, mes parents nous emmenaient, mes sœurs et moi, récolter des fraises dans les fraisières des fermiers des Cantons de l'Est On les consommait sous différentes formes : fraîches, avec de la crème et un peu de cassonade, en confitures, en différents desserts, dont le fameux « shortcake » avec de la vraie crème. On en congelait aussi beaucoup pour en avoir toute l'année.

Culture délicate

Il n'est pas si facile de trouver des fraisières biologiques. Il faut dire qu'elle est délicate la fraise, pas seulement au niveau du goût, mais aussi lors de sa culture. Elle est sensible aux maladies fongiques et quand le temps est très humide, les récoltes sont grandement touchées, à moins de mettre des fongicides.
Il y a aussi les insectes, les adventices et les oiseaux qui peuvent faire des ravages. La ferme Sanders à Compton produit depuis plusieurs années des fraises biologiques avec succès. J'ai eu le bonheur de faire mes réserves de fraises là-bas quand je vivais dans cette région. Plusieurs producteurs réguliers font du dépistage écologique et prennent des mesures pour réduire les produits chimiques au minimum. Il faut s'informer pour vérifier les pratiques de chacun.
Les belles grosses fraises de Californie que l'on trouve l'hiver et au printemps sur nos rayons sont abondamment arrosées. Selon Environmental Working Group, la fraise cultivée aux États-Unis est l'un des douze produits les plus contaminés par les résidus de pesticides. Cet organisme ne recommande pas de consommer des fraises, à moins qu'elles ne soient biologiques.
Il y a également les fraises sauvages, que je cueille au passage quand j'en vois lors de promenades estivales. Quel délice ! Leur saveur sucrée surpasse celle des fraises cultivées et la patience exigée pour les récolter aussi. Mais cela vaut l'effort quand on déguste un dessert qui les couronne.

Vertus

Les feuilles de fraisier sauvage sont utilisées depuis très longtemps contre les diarrhées. Elles sont considérées comme astringentes, diurétiques, dépuratives, rafraîchissantes et toniques. Ces usages sont délaissés aujourd'hui et on parle moins de ces vertus, mais on aurait tout intérêt à récolter des feuilles au printemps. On pourrait s'en servir pour les pierres aux reins et les infections de vessie. Les feuilles pilées sont extraordinaires en cataplasme sur les ulcères et les plaies infectées.
Et que dire du fruit ! Il est diurétique, anticancéreux apéritif, rafraîchissant, antioxydant, hépatique, nutritif et tonique.
Son effet diurétique est facile à vérifier, il suffit de manger une bonne portion de fraises pour le ressentir. Cela permet de nettoyer le sang. D'ailleurs, la fraise est très utile contre la goutte.
 
Voici l'histoire du botaniste Linné à ce sujet :
 
« En 1750, j'endurais de telles souffrances à cause de la goutte que je pouvais à peine marcher. La douleur devint si intolérable qu'après sept nuits sans sommeil, je voulus prendre de l'opium; un ami qui vint me voir ce soir-là m'en empêcha. Ma femme demanda si j'aimerais manger quelques fraises des bois. « Assurément », répondis-je; c'était le début de la saison et elles étaient délicieuses. Une heure plus tard, je m'endormis et je me réveillai à deux heures du matin, étonné de constater que je m'étais endormi en dépit de la douleur... Je demandai s'il y avait encore quelques fraises, et on me donna celles qui restaient; je les mangeai et dormis jusqu'au matin. La douleur s'était localisée dans la région des chevilles; le lendemain, je mangeai autant de fraises que je pus, et le jour suivant. La douleur avait complètement disparu. Je craignis d'abord que ce ne fût la gangrène; mais la chair était parfaitement saine. En dépit de ma faiblesse, je pus me lever.
 
La maladie apparut à nouveau les deux années suivantes, mais alla toujours en s'atténuant et chaque fois les fraises sauvages me guérirent. Malheureusement, je ne peux pas cultiver de fraises en hiver, et je n'ai jamais réussi à les conserver. » Lettre de Linné à Giseke
 
Et le biographe de Linné ajoute : « Toutefois, la Reine vint à sa rescousse et donna l'ordre de cultiver des fraises sauvages dans les serres chaudes du palais, spécialement à l'intention de Linné ».
Quel avantage d'avoir des contacts aussi utiles !
 
Je trouve cela fabuleux : on se complique parfois la vie à trouver des remèdes contre ces malaises et il suffit de manger des fraises. Quelle délicieuse façon de se soigner !
 
Plusieurs études ont mis en évidence l'effet antioxydant et anticancéreux des fraises fraîches, congelées ou lyophilisées.
 
Consommer de 375 à 500 ml de fraises fraîches ou congelées quotidiennement a permis de mesurer dans l'urine l'augmentation de la capacité antioxydante de l'organisme. Des fraises lyophilisées ont inhibé le cancer du sein et du cerveau lors d'autres études. Des extraits ont prévenu le cancer du côlon et du col de l'utérus. Les fraises lyophilisées, c'est délicieux ! La lyophilisation est un processus de séchage à froid. La fraise conserve sa couleur et sa taille et l'eau est remplacée par de l'air, elle est donc légère et savoureuse.
 
Les flavonoides de la fraise réduisent le risque d'athérosclérose et d'hypercholestérolémie selon certaines études, entre autres avec des femmes ménopausées. On a démontré que la consommation d'une portion de fraises par semaine diminuait le risque de mortalité par maladies cardiovasculaires. Ses sucres seraient aussi appropriés pour les diabétiques.
 
La fraise est rafraîchissante et très appréciée durant les chaleurs estivales. Elle permet ainsi de dégager la chaleur excessive de l'organisme, notamment au niveau du foie. D'ailleurs, on attribue les éruptions cutanées (urticaire) qu'elle peut susciter à des réactions allergiques, mais Steiner dit que c'est parce qu'elle nettoie l'organisme et que cela peut entraîner des manifestations sur la peau. Il faut aussi surveiller la provenance des fruits et les produits chimiques qui ont servi à sa culture, ils pourraient aussi être la cause de la réaction. Reste que certaines personnes sont allergiques aux fraises.
 
Elle est apéritive, donc elle ouvre l'appétit et prépare aux repas. On devrait d'ailleurs consommer les fruits avant le repas et la fraise convient tout à fait. On le remarque, car on peut manger beaucoup de fraises sans se sentir rassasié, dans le sens de repu. Malgré une bonne valeur nutritive, elle n'assouvit pas la faim, elle contient en effet plusieurs minéraux dont du potassium, du manganèse, du magnésium, du fer, de la chaux, du sodium, du phosphore, de la silice, de l'iode, du brome et du calcium.
 
Elle est une excellente source de vitamine C et une bonne source d'acide folique (important pour les femmes enceintes). On y trouve aussi plusieurs vitamines et plusieurs composés phénoliques, dont l'acide ellagique et des anthocyanines qui lui donnent sa belle couleur et qui auraient des effets protecteurs contre le cancer.
 
Dans les cas d'anémie, la fraise s'allie à l'ortie, car elle facilite l'assimilation du fer. Pelikan l'explique de la façon suivante : « … par exemple associée à l'ortie. Un tel médicament active la formation du sang à partir de la sphère métabolique et propulse aussitôt le flux sanguin jusqu'à l'extrême périphérie du corps, grâce à l'acide silicique. (Ce processus peut même être trop fort pour certaines constitutions et provoquer des éruptions sur la peau.) Mais dans maintes formes de l'anémie, on fabriquera un excellent remède à base de fraises. » Encore une fois, voilà une délicieuse façon de se soigner !  Pourquoi pas une salade avec des fraises et des épinards?

Cures
Elle sera tout indiquée pour les arthritiques, les goutteux, ceux qui ont des problèmes de foie, de peau ou de reins. On peut, soit :
 
- Consommer 450 g de fraises pendant un ou deux jours par semaine pendant quelques semaines.
- En faire une monodiète pendant plusieurs jours.
 
Quand on choisit la première option, on mange quand même trois repas par jour, mais avec une diète allégée. Le déjeuner pourrait se faire avec des fraises seulement ou principalement selon chacun. La deuxième option est particulièrement indiquée pour les cas plus sérieux où un bon nettoyage s'impose comme pour la goutte ou l'arthrite. Et pas besoin d'être malade pour profiter de ses bienfaits. On peut simplement faire une cure comme mesure de prévention et de délices. Bien sûr, si on a une condition de santé particulière avec médication, il est prudent de s’informer auprès d’un professionnel de la santé avant d’entreprendre des cures.

Références :
FONTAINE, Johanne, Les plantes en vrac, HerbArt 3, L'Herbothèque, Lantier, Québec, 2011.
MESSÉGUÉ, Maurice, Mon herbier de santé, Opera Mundis, Paris, 1975, 480 p.
O'REILLY, Moira, LALONDE, Catherine, Cours de nutrition, L'Herbothèque, Lantier, Qc, 2007, 274 р.
PELIKAN, Wilhem, L’homme et les plantes médicinales, tome 1, Triades, Paris, 1962, 400 pages.
WOOD, Matthew, The Earthwise herbal, A Complete Guide to Old World Medicinal Plants, North Atlantic Books, Berkeley, California, 2008, 571 p.
Publications électroniques
GIAMPIERI, F. et coll. Strawberry as health promoter : an evidence based review, Food Funct., 2015 May;6(5):1386-98.